Ecriture inclusive et rédaction scientifique [Editorial]

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Editorial du Numéro 23
Auteurs
Robert Meslé
Référence
Meslé R. Ecriture inclusive et rédaction scientifique [Editorial]. La Revue de l'Ostéopathie. 2019;23:1-2.

Chères lectrices, chers lecteurs, ou Cher·es lecteur·ices (?).

L'écriture dite inclusive est un ensemble de règles visant à utiliser un langage non sexiste ou non genré, ou dégenré... son objectif étant d'éviter toute discrimination par le langage. La règle la plus discutée concerne l'utilisation du point médian – à mi-hauteur de ligne – pour présenter les termes concernant les femmes et les hommes, par exemple « les patient·es », « les participant·es » voire, selon une autre version, « les patient·e·s », « les participant·e·s ».

Le comité éditorial s'attache à ce que les articles soumis à La Revue de l'Ostéopathie respectent les principes de la rédaction scientifique :

  • la clarté, en utilisant un langage compréhensible par le lectorat concerné : on écrit pour être lu et compris ;
  • la précision, en s'attachant à la quantité et la qualité des informations présentées, donc à leur pertinence ;
  • la concision, en utilisant les formulations les plus réduites possibles sans sacrifier ni la clarté ni la précision.

Quel est l'intérêt d'aborder le sujet de l'écriture inclusive ? Nous publions essentiellement des comptes-rendus de recherches expérimentales, cliniques ou bibliographiques portant sur des individus, et veiller à l'égalité des représentations entre les femmes et les hommes est nécessaire. Par conséquent, nous sommes concernés par la manière de décrire les populations participant aux études publiés dans la revue.

En France, l'écriture inclusive est source de débats assez vifs. Si le consensus existe sur la nécessité de respecter l'égalité entre les sexes, les détracteurs de l'écriture inclusive lui reprochent son illisibilité. Pour l'Académie française, elle serait un « péril mortel », et aboutirait « à une langue désunie, disparate dans son expression, créant une confusion ». Pour le lexicologue Alain Rey, « elle est inutile, ne serait-ce que parce qu'elle ne peut pas se représenter à l'oral. » D'autres dénoncent les propositions de remplacer « ils/elles », « tous/toutes » et « ceux/celles » par « iels », « toustes » et « ceulles »... De plus, un suffixe féminin ne présente les femmes qu'à moitié, et est placé après le terme masculin, ce qui ajoute un peu plus de la même chose. Et le cas de la Hongrie vient moduler l'argument selon lequel la langue forgerait les représentations égalitaires : la langue hongroise n'est pas genrée, et il ne semble pas ce pays soit plus égalitaire que les autres.

L'écriture inclusive comprend d'autres règles, que nous avons adoptées, proposant d'utiliser des termes épicènes ou, à défaut, des doubles flexions. Un terme est dit épicène lorsqu'il ne varie pas selon le genre, comme « personne », « élève » ou « ostéopathe ». La double flexion consiste à présenter à la suite les deux formes, masculines et féminines. Il nous semble plus respectueux de présenter en premier les formulations féminines, à l'instar de Pierre Desproges qui débutait ses plaidoiries du Tribunal des flagrants délires en utilisant à la fois une double flexion et en doublant un mot épicène : « Françaises, Français ! Belges, Belges ! »

Ce débat, pris très au sérieux, renforce les plus ardents défenseurs de l'écriture inclusive dans des retranchements idéologiques. L'objectif de cet éditorial n'est pas de clore ce débat ni de prôner une position définitive. L'idée de l'écriture inclusive est généreuse, mais nous avons relevé des paradoxes parmi certains organismes qui proposent des stages d'écriture inclusive : une agence qui présente des stages en entreprise précise, sur un site Internet, qu'elle a déjà mis en place des ateliers auprès de « professionnels [sic] ». Un autre site, ardent défenseur de l'écriture inclusive et de la lutte contre les stéréoptypes, qui présente un livre traitant de ce sujet, mentionne « le prix pour l’acheteur [sic] ». Comment conclure cet éditorial ? En nous adressant à vous par la formule « Chères lectrices, chers lecteurs » plutôt que « Cher·es lecteur·ices... » même si, en modifiant les derniers propos de Claude Favre de Vaugelas, « [...] l'un et l'autre s'écrit... ou s'écrivent. »

Robert Meslé

Directeur de la publication

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